COMMUNIQUE DE PRESSE 6 OCTOBRE 2023

Cher.es ami.es

Un appel à manifestation émanant d’un Collectif international de défense des femmes afghanes, a pris de court et abusé une partie des associations féministes amies de NEGAR.

Nous ne soutenons pas cet appel.

Le texte de cet appel s’appuie en effet, sur une manipulation de faits historiques, faisant du 7 octobre 2001, jour de la libération de l’Afghanistan du joug taliban, un jour de douleur, et souscrivant ainsi au point de vue des taliban.

Nous souhaitons apporter le plus ferme démenti à cette transformation des faits.

Vous trouverez ci-joint notre communiqué, en réponse aux questions qui nous ont été posées.

Bien amicalement.

Shoukria et Geneviève

 

Geneviève COURAUD – HUON

06 61 34 75 73

Genevieve.couraud@wanadoo.fr

Genevieve13.couraud@gmail.com

Secrétaire générale de NEGAR

 

Nous ne participerons pas à la manifestation du 7 octobre 2023

Le 7 octobre 2001 est le jour de la libération de l’Afghanistan de la barbarie des milices terroristes talibanes par les forces du gouvernement légitime et de la résistance de l’Afghanistan, soutenues par l’International Security Assistance Force – ISAF, une coalition internationale mandatée par l’ONU.

Un appel à manifestation provenant d’un Collectif international, qui se présente comme porte-parole d’un « Mouvement spontané des femmes afghanes », relayé çà et là, appelle à manifester le 7 octobre sous prétexte que « c’est une date douloureuse dans la mémoire du peuple afghan (…) c’est le 7 octobre 2001 que le gouvernement des États-Unis avec une vaste coalition de gouvernements et l’OTAN ont engagé en Afghanistan leur prétendue “guerre contre le terrorisme”.»

 

NON, le 7 octobre 2001 n’est pas une date douloureuse.
Nous dénonçons ce détournement de l’histoire. Faut-il rappeler les faits ? Des faits auxquels, nombreuses et nombreux, vous avez participé ?

 

Durant les 4 longues années (1996-2001) d’occupation de l’Afghanistan par les milices terroristes talibanes, nous avons avec acharnement, tou·tes ensemble, alerté, rassemblé, mobilisé sur le sort de l’Afghanistan, avec le soutien des associations féministes et de droits humains, avec les syndicats, les partis politiques, en France, en Europe, aux États-Unis, auprès de l’ONU, du parlement européen, des gouvernements ; nous avons interpelé les pays démocratiques pour qu’ils viennent apporter leur aide à la libération de l’Afghanistan.

Après l’attentat qui a tué le commandant Massoud (9 sept 2001) et les attentats des Twin Towers (11 sept 2001), c’est une coalition internationale, l’ISAF, composée de nombreux pays – Canada, Grande Bretagne, France, Allemagne, Italie, Portugal, Espagne, États Unis – qui est venue appuyer les forces de la résistance afghane pour la libération de l’Afghanistan, et non pas les EU seuls ou l’OTAN.

Nous saluons la mémoire des jeunes gens, venus de tous ces pays, qui ont donné leur vie pour la liberté de l’Afghanistan, nous pensons à eux, nous ne les oublions pas !


Le 7 octobre 2001, les taliban sont chassés de Kaboul, à l’immense satisfaction de toute la population afghane, exsangue.

Plusieurs membres de NEGAR présentes à Kaboul et dans d’autres départements d’Afghanistan, auprès des populations, dès la fin de cette année 2001 peuvent en témoigner.
Nous étions quelques-unes, à Kaboul lors de la deuxième Conférence des droits des femmes afghanes en mai 2002, et nous avons entendu les 500 femmes afghanes venues de toutes les provinces de l’Afghanistan qui témoignaient de leur soulagement et de leur joie d’avoir retrouvé la liberté, et demandaient notre aide pour reconstruire leur pays.

S’est alors ouverte une période de 20 ans de paix, une paix armée, certes, sans cesse et de plus en plus menacée à partir de 2005 par les attentats meurtriers des taliban, dont la population civile était la première victime.
Mais il y avait un état, la démocratie était installée. Ce fut alors la possibilité pour les afghan·es de reconstruire leur pays, de se mobiliser pour la démocratie et l’égalité entre les femmes et les hommes qui sera inscrite dans la Constitution de l’Afghanistan (2004), grâce à l’importante mobilisation des femmes afghanes que NEGAR a aussi portée.

Durant ces 20 ans, les femmes afghanes ont considérablement avancé dans leur autonomie et profité de leurs droits. Elles sont devenues médecins, magistrates, ingénieures, journalistes, artistes, députées (69 en 2021 !), elles ont trouvé leur place dans l’armée, la gendarmerie, la police, elles ont piloté des avions… Le secteur des médias a explosé, des dizaines de station de radios et de chaînes se sont créées où elles avaient toute leur place ! Les petites filles partout étaient scolarisées.

Voici les chiffres de l’année 2020 : 3,5 millions de filles scolarisées, 100 000 femmes dans les universités publiques et privées, 1 millier devenues cheffes d’entreprise, 500 femmes juges et procureures, 12 000 femmes dans la police, l’armée. C’est cette génération formidable que les taliban désignent par l’expression de « génération perdue ».

Voilà ce que nie l’appel indigne que nous dénonçons.

Le 29 février 2020, les honteux accords de Doha menés par le président des États-Unis Trump avec les taliban, hors participation des représentant·es afghan·es, a livré l’Afghanistan aux taliban, avec l’assurance en retour que ces derniers ne « toucheraient ni à eux ni à leurs intérêts ni à ceux de leurs amis ». Sans un mot pour le peuple afghan!

Élu en novembre 2020, le président Biden a accéléré le processus, et favorisé l’entrée des milices terroristes talibanes dans Kaboul le 15 août 2021.
Cette trahison est terrible pour l’Afghanistan et pour tou·tes celles et ceux qui ont soutenu la libération des femmes afghanes !

Manipuler l’histoire est une faute contre la mémoire d’un peuple et contre l’humanité ; c’est en ce cas aussi une insulte pour les millions d’afghan·es d’Afghanistan et de la diaspora, disséminé·es partout en France, en Europe et dans le monde, qui ont dû à nouveau quitter leur pays.

Aujourd’hui, comme en 2001, nous devons mobiliser à nouveau les forces démocratiques partout dans le monde pour venir en aide à l’Afghanistan, soutenir la résistance, et faire cesser le calvaire des femmes et de la société afghane, les déplacements de population, les génocides commis impunément.

Nous devons empêcher la reconnaissance des taliban.

Et en aucun cas nous n’accepterons que soit salie une page glorieuse de notre histoire.

Paris, le 4 octobre 2023

Shoukria HAIDAR, présidente de NEGAR-Soutien aux femmes d’Afghanistan

Geneviève COURAUD, Secrétaire générale

Contact : https://www.negar-afghanwomen.org/2/

genevieve13.couraud@gmail.com / 06 61 34 75 73